Chapitre 01
Un arbre qui murmure…
Pour ceux qui écoutent,
Des branches qui touchent,
Pour ceux qui ressentent,
Des feuilles qui caressent,
Pour ceux qui sont abattus,
Dans le silence, l’arbre murmure,
Embrassant chaque âme qui passe,
Comme un orchestre à l’intérieur d’une forêt,
L’ensemble de ces chuchotements forment une chanson,
Déchirant un petit cœur !
Serrer un souffle !
Étrangler un esprit !
Jusqu’à ce que la seule chose qu’il reste à ressentir,
Ne soit plus que le murmure des arbres…
Le doigt de Munir changea rapidement la chaîne de radio, passant d’un profond poème à une chanson rock qui perçait les oreilles. Munir n’avait jamais aimé la station littéraire. Il ne l’avait même jamais écoutée, mais pour une raison quelconque, après avoir allumé la radio au début de son voyage, cette émission remplissait la totalité de sa Proton Gen2. Le plus étrange, c’est que Munir, qui n’a pas d’intérêt pour la littérature ou à la poésie, n’a pas immédiatement changé la station. À défaut, il est resté silencieux… Et fit le vide dans son esprit pour faire de la place à la voix bourrue d’un homme qui parlait d’arbres.
Pour la première fois de sa vie, Munir a prêté attention à l’art. Pour la première fois de sa vie, Munir a ouvert son cœur à l’art et au mystère. Pour la première fois, il a tenté de comprendre la subtilité de ce moment. Mais à la fin du récital de poèmes, il s’est rendu compte que ce n’était plus lui. Il n’était pas un être créatif, qui passait son temps avec de belles œuvres. Sa personnalité était du genre à s’opposer avec véhémence à ces choses triviales. C’était un homme pratique. Quelqu’un qui ne considère que le noir et le blanc. Il se nourrissait de faits. Son air était une information claire. Vraisemblablement, vivre cinq ans en tant que policier a cimenté cette personnalité. Dure et froide.
Le divertissement pour Munir était superficiel et non-significatif, il ne nécessitait pas une attention et une appréciation particulière. Ce poème n’est pas un divertissement pour lui. Que voulait dire ce vieil homme de la radio ? Un arbre qui murmure ? C’est absurde ! Les arbres n’ont pas de caractéristiques humaines. C’est une forme de vie qui existe scientifiquement pour équilibrer l’écosystème. Ils donnent de l’oxygène et de la nourriture. C’est pourquoi Munir détestait la littérature. Ou tout ce qui contient des caractéristiques ou des valeurs artistiques. Mais pour une raison inconnue, aujourd’hui, il était prêt à passer six minutes de son précieux temps à écouter le poème sur les arbres qui chuchotent. Ses oreilles étaient comme contraintes. Son cœur s’est arrêté. Ses mains étaient lourdes, car le poème n’avait pas encore révélé son sens. Pendant six minutes, c’était comme s’il était pétrifié, son esprit emporté, avant de finalement revenir à lui.
Munir secoua fortement la tête, essayant de chasser le poème de son esprit. Il augmenta le volume de la radio jusqu’à ce que la chanson rock de son groupe préféré fasse trembler le rétroviseur de la voiture. Munir souriait tout en faisant du headbanging. Il riait parfois. C’était amusant d’écouter des paroles qui ne parlaient que d’agression et de femmes sexy. Deux choses qui l’intéressaient beaucoup. Les agressions étaient normales dans sa vie, compte tenu de sa profession, et les belles femmes, c’étaient tout ce que les hommes du monde entier désiraient. Pendant toute sa vie d’adulte, il n’a fait qu’alterner entre ces deux choses. Le travail et les femmes. Comme une trame solide formant un tapis de son être.
Soudain, son téléphone a sonné. Munir a attrapé son casque et l’a mis sur son oreille.
« Salut. »
« Assalamualaikum… » [1] Une voix douce de femme retentit de l’autre côté de la ligne.
« Waalaikummussalam. » [2] Munir a répondu d’une voix plate.
« As-tu atteint le village ? »
« Pas encore. J’ai encore de la route. »
« Où es-tu ? »
« Je viens d’arriver à Pahang. »
« Oh… Tu as mangé avant le voyage ? »
« Oui. »
« Qu’est-ce que tu as mangé ? »
« Sura, je suis en train de conduire. »
« Oh, désolé… »
« Je t’appellerai plus tard quand je serai arrivé. »
« Ok… Je… »
« Hmm ? »
« Je t’aime… »
« Ok ! »
Un bouton rouge a été pressé, mettant fin à l’appel. Munir a souri. Il était heureux de recevoir un appel de Suraya. Il se sentait touché par la personnalité attentionnée de son amoureuse. Cependant, c’était dans sa nature de ne pas montrer ses émotions. Il était toujours sérieux. Strict. Loin d’être un romantique. Seul Dieu savait à quel point il aimait cette femme. C’était la vérité. Seul Dieu le savait puisque même Suraya n’avait jamais entendu de mots d’amour sortir des lèvres de Munir. Pendant les quatre années de leur relation, Munir n’avait jamais parlé d’amour. Lorsque Suraya le disait, Munir se contentait de hocher la tête ou de l’affirmer, faisant preuve d’entêtement, empêchant ses lèvres de prononcer ces mots sacrés. D’autres femmes n’auraient pas toléré sa personnalité sèche. En fait, certaines de ses anciennes amantes ont mentionné que même les robots avaient plus d’émotions. Mais Suraya était différente. Pour elle, l’amour signifiait tout accepter, que ce soit le bon ou le mauvais. Plus important encore, même si Munir ne l’a jamais dit ou montré, Suraya savait qu’il l’aimait, car le véritable amour se manifeste. Même quand il est enterré sous la mer la plus profonde.
Munir a ralenti sa voiture. Il a tourné le tête, regardant autour de lui. La zone lui était étrangère. Il ne l’avait jamais traversée sur le chemin de sa ville natale.
Est-ce que j’ai pris une mauvaise direction ?
Munir conduit prudemment. La voiture a ralenti quand il a réalisé qu’il était entré dans une zone rurale. Ses yeux observent sauvagement, au cas où il y aurait quelqu’un qui pourrait le renseigner sur son chemin. La zone était calme. Munir conduit sa voiture en face d’une vieille maison. Après l’avoir dépassés, il fit une marche arrière, s’arrêtant juste devant. Munir est sorti de la voiture. Ses yeux pointent directement vers les escaliers de la vieille maison en bois. Puis, il a regardé autour de lui. Personne. Ses yeux sont allés vers les escaliers de derrière. Il y a un enfant là-bas. Un garçon. Le garçon était assis là, seul. La tête penchée vers le bas, il lisait un livre. Cachant son visage, Munir s’est approché de l’enfant.
Avant de dire quoi que ce soit, il a observé l’état de l’enfant. Ses vêtements étaient en lambeaux. Ses paumes étaient sales et ses ongles remplis de saleté. Ses jambes et ses genoux étaient recouverts de boue séchée.
« Mon gars… »
Le garçon était silencieux.
« Mon gars… Que fais-tu ici ? »
Toujours pas de réponse.
Munir s’est assis sur les escaliers à côté du garçon.
« Vis-tu ici ? » Munir demanda même si cela semblait peu probable, car la maison était trop délabrée, comme si elle avait été abandonnée.
Le garçon a secoué la tête.
« Es-tu seul ? »
Le garçon a levé la tête, montrant son visage à Munir. Calme. Trop calme. Ses yeux étaient vides, comme s’ils étaient morts.
« Es-tu seul ? » Munir a répété sa question.
« Avec ma grand-mère… » Réponds le garçon tranquillement.
« Oh, où est ta grand-mère ? »
Le garçon a pointé un doigt vers la maison.
Munir s’est levé. Il pousse la porte qui est entrouverte et entre. La maison était équipée de meubles comme n’importe quelle autre maison. Cependant, ils étaient tous couverts de poussière et de toiles d’araignées. Dans le salon, il y avait quelques sacs remplis de vêtements. Munir a vu que sur l’un de ces sacs se trouvait un hijab blanc.[3] Probablement celui de la grand-mère de l’enfant, a-t-il pensé.
Munir a inspecté la maison de fond en comble. Chaque centimètre carré était délabré. Elle a certainement été abandonnée pendant des années. Munir chercha jusqu’à atteindre l’arrière-cour. C’est étrange, il n’y avait pas de trace de la grand-mère de l’enfant. Munir retourna à l’avant, s’asseyant à côté du garçon dans l’escalier.
« Sais-tu où est allée ta grand-mère ? »
Le gamin a haussé les épaules.
Munir soupira. Ses yeux ne cessaient d’observer son environnement. Il n’y avait personne. Il n’avait pas le cœur à laisser l’enfant-là. La maison était vieille et aucune autre maison n’était à proximité. Et si quelque chose de grave arrivait ? Munir décida de rester là jusqu’à ce que la grand-mère revienne chercher son petit-fils.
Deux heures sont passées. Dans son cœur, Munir maudit la vieille femme qui avait laissé seul un jeune enfant pendant deux heures dans la vieille maison. Dans son esprit, Munir a élaboré un plan. Il va attendre encore 30 minutes. Si la vieille femme ne revenait pas, il emmènerait l’enfant avec lui.
Une autre demi-heure passa. Munir demanda au garçon qui était resté silencieux de le suivre. Le garçon le suit sans poser de question.
Avant d’emmener le garçon, Munir a décidé de demander aux personnes aux alentours si quelqu’un le connaissait. Cependant, après avoir fait le tour du village et demandé à tous ceux qu’il rencontrait, personne ne savait qui était le garçon. Quand il leur a posé des questions sur la maison, ils ont dit qu’elle était abandonnée depuis sept ans.
« Quel âge as-tu ? » Munir a demandé en tapotant le garçon qui montrait de la confusion sur son visage.
« Sept ans… »
« Sept ans ? » Munir voulait une confirmation.
Le garçon a hoché la tête.
Munir fit le lien entre l’âge du garçon et le moment où la maison avait été abandonnée. Sept ans.
C’est probablement une coïncidence…
Munir a écarté cette pensée. Il ne peut pas se préoccuper de choses triviales en ce moment. Il devait réfléchir à ce qu’il allait faire de l’enfant.
Avant de quitter le village, Munir laissa une note contenant son nom et son numéro de téléphone au cas où la grand-mère de l’enfant reviendrait chercher son petit-fils.
L’horloge a sonné 11 h 35. Pour une raison inconnue, le voyage semblait si long. Le long de la route, il y avait beaucoup d’obstacles et de problèmes. Un pneu crevé. De la fumée provenant du moteur. Et bien d’autres. Un voyage qui aurait dû durer six heures avait maintenant atteint onze heures.
« C’est une bonne chose que tu sois là, Adib… Je me suis moins ennuyé », dit Munir en tapotant la tête d’Adib à côté de lui. Finalement, après de multiples demandes et d’attention, le garçon a fini par dire son nom à Munir. Adib. C’est la seule réponse que Munir a obtenue, par rapport aux dizaines de questions posées depuis leur rencontre dans la maison abandonnée.
Munir s’est plusieurs fois frotté les yeux. Il a baillé un nombre incalculable de fois. Il était somnolent, mais força ses yeux à s’ouvrir. Il ne voulait pas perdre contre la fatigue. Il ne voulait pas s’arrêter à nouveau. Il en était fatigué. Il s’était arrêté d’innombrables fois en chemin pour diverses raisons. Cette fois, il était déterminé à ne plus s’arrêter. Tant pis s’il avait sommeil. Ce qui est important, c’est que le voyage continue. Pour que cette journée fatigante se termine rapidement.
Munir alluma les feux de route de la voiture afin d’éclairer plus loin la route. Traverser les routes de campagne était un véritable défi, surtout dans cette nuit noire. Parfois, Munir regardait de son côté pour s’assurer qu’Adib allait bien. Comme d’habitude. Il restait simplement assis en silence en lisant un livre usé. Il n’avait même pas envie de dormir. C’était comme ça depuis le début. Ses yeux étaient concentrés uniquement sur ces vieilles pages. Ce n’est que lorsque Munir lui parlait qu’Adib se tournait et montrait son visage. Quand Munir lui souriait, Adib lui rendait la pareille avec un sourire bref et fade.
« Tu n’as pas sommeil, Adib ? Tu devrais d’abord dormir. On a encore beaucoup de route avant d’atteindre notre destination… »
Adib était silencieux. Ses yeux se sont concentrés sur l’avant. Munir a divisé son regard sur la route devant lui et sur Adib. Le visage d’Adib avait l’air inquiet, ce qui a poussé Munir à le regarder plusieurs fois. Il y a même eu des moments où ses yeux ont quitté la route.
« Tu vas bien, Adib ? »
Adib a gardé le silence. Soudain, il a levé lentement sa main droite et l’a pointée vers l’avant. Munir a tourné la tête. Dieu sait comment, au milieu de la route, il y avait une femme immobile. Sa tête était inclinée vers le bas. La femme aux cheveux longs était immobile, figée sur place. Munir était choqué. Il a rapidement appuyé sur les freins. Sa voiture s’est mise à hurler et à tourner plusieurs fois avant de s’arrêter sur le bord de la route. Un peu plus et elle aurait heurté un grand arbre près de la forêt.
Munir a essayé d’inspirer, mais n’a pas réussi. Sa poitrine s’agitait, trop effrayée pour même respirer. Il a massé sa poitrine plusieurs fois tout en récitant « istighfar » [4]. Munir a regardé à sa gauche, voulant s’assurer qu’Adib allait bien. Il s’est senti soulagé en voyant qu’Adib n’était pas du tout affecté. Cependant, son soulagement n’a duré qu’un instant, car il a senti qu’Adib était trop calme. Comme si rien ne s’était passé.
Munir a détaché sa ceinture de sécurité et est descendu. Son esprit espérait seulement que la femme était en sécurité. Munir a marché jusqu’au milieu de la route, couverte d’obscurité, où se tenait la femme. Cependant, elle n’est plus là. Munir a regardé autour de lui. Toujours personne. La lumière de son téléphone est devenue sa lampe de poche. Pourtant, il n’y avait vraiment personne. C’est étrange.
Munir est simplement resté là pendant un moment. Il était confus, ne sachant pas quoi faire. Il a commencé à s’interroger sur ce qu’il voyait. Était-il vraiment là où était-ce simplement une illusion ? Il n’y a qu’une seule façon de le découvrir.
« Adib… As-tu vu cette femme sur la route ? »
Adib a secoué la tête.
« Je n’ai rien vu », répondit le garçon, nonchalant.
« Mais c’est toi qui me l’a fait remarquer ».
Adib haussa les épaules.
« Souviens-toi ? Pendant que je te regardais, tu m’as dit de regarder devant. Tu as levé la main et pointé du doigt comme s’il y avait quelque chose sur la route. Quand j’ai regardé, il y avait bien une femme ?
« Ah bon ? Je n’ai rien vu. »
Munir soupire, perplexe devant la réponse d’Adib, mais il ne peut rien y faire. Puis, Munir a essuyé la sueur froide qui couvrait son front. Une sueur qui est apparue à cause de son esprit et de son cœur perturbés qui ne veulent pas accepter la situation.
Après avoir pris quelques minutes pour se calmer et rationaliser, Munir a redémarré le moteur et a continué à conduire. Les images de la femme n’ont cessé d’apparaître dans son esprit tout au long du trajet. Plusieurs raisonnements et théories se sont formés, mais il n’en accepta pas un seul. Minuit. Au milieu de la route, dans une forêt sans aucun village à proximité. Une femme. Seule. Se tenant immobile au milieu de la route dans l’obscurité. Pourquoi ? Que faisait-elle là et où a-t-elle disparu ? Toutes ces questions flottaient dans la tête de Munir, sans réponse.
« Ah… Il doit y avoir une explication à cela… » Pensait Munir pour se persuader. Mais même ainsi, son cœur ne pouvait pas l’accepter. Le cerveau disait quelque chose alors que son cœur ressentait autre chose. Le cerveau disait qu’il y avait une explication logique. L’instinct lui disait que quelque chose de très mauvais et d’étrange était en train de se produire. Lequel des deux Munir devrait-il croire ?
Petit à petit, sa personnalité judicieuse a calmé son esprit. Pour lui, les pensées rationnelles étaient la vérité. Les instincts, par contre, n’ont jamais été prouvés scientifiquement. Finalement, Munir a réussi à trouver son équilibre par rapport à la situation. La chose qui s’était produite plus tôt était quelque chose de normal et avait sa propre explication logique.
« Peut-être que c’était une personne perdue, folle… Oui. C’est certainement l’explication », dit Munir, confiant.
À 2 h 30 du matin, ils sont enfin arrivés à destination. Munir appelle le téléphone de la maison et demande à sa mère d’ouvrir la porte.
« Assalamualaikum, maman. Comment vas-tu ? » Munir a attrapé la main de Ramlah alors que la porte en bois s’ouvrait.
« Je vais bien. Pourquoi es-tu arrivé si tard ? » C’est la première question de Ramlah bien qu’en vérité elle était plus intéressée par le garçon que son fils a amené avec lui.
« C’est une longue histoire, maman. » Munir a pris son sac et s’est préparé à entrer. Cependant, juste avant qu’il ne fasse un pas, Ramlah l’arrêta.
« Qu’est-ce qui ne va pas, maman ? Tu ne me laisses pas entrer ? »
Les yeux de Ramlah étaient sauvages, regardant les environs.
« Reste un peu à l’extérieur. Récite trois fois le verset al-kursi[5] et souffle autour de toi. Ce n’est qu’ensuite que tu pourras entrer « , a-t-elle ordonné.
Munir obéit.
« Viens, mon enfant. Tu devrais entrer en premier. Nous ne voulons pas que tu attrapes froid. Le frère Munir entrera plus tard… » Dit Ramlah en tirant doucement sur l’épaule d’Adib.
« À qui est cet enfant ? » Ramlah a eu le temps d’interroger Munir avant d’entrer aux côtés d’Adib. Munir dont la bouche marmonnait, récitant le verset al-kursi, s’arrêta un instant pour répondre.
« Je te raconterai tout plus tard. Aide-le à se nettoyer, donne-lui des vêtements de rechange. », demanda Munir. Ramlah a hoché la tête. Même s’il ne lui avait pas demandé, elle avait déjà l’intention de le faire. Il était évident qu’Adib était sale et désordonné. Par conséquent, son premier instinct de mère était de donner un bain à l’enfant et de changer sa chemise avant de le mettre au lit. Et c’est exactement ce qu’elle a fait. Elle a même peigné ses cheveux proprement et lui a mis des couches de poudre. Après l’avoir allongé sur un lit et l’avoir couvert d’une couverture, Adib s’est immédiatement endormi. Il était probablement très fatigué.
Quand elle est sortie de la chambre de Munir, Ramlah a attrapé son fils. Des explications étaient nécessaires. Munir, qui était assis dans le salon, a été choqué par la dure tape de sa mère.
« Qu’est-ce qu’il y a, maman ? Ça ne peut pas attendre jusqu’à demain ? Je suis fatigué… » Se plaint Munir.
« N’importe quoi ! Tu as beaucoup de choses à me dire. »
« Quelles choses ? »
« Il demande en plus… L’enfant qui dort dans ta chambre, de qui est-il ? Pourquoi était-il dans un si mauvais état ? Pourquoi ses vêtements étaient couverts de saletés ? Où l’as-tu trouvé ? »
« Il a été abandonné par sa grand-mère. Je l’ai pris tout en la cherchant. Dommage… »
« Tsk tsk tsk… Penser qu’une grand-mère est capable de faire ça. Et nous prions jour et nuit pour un petit-enfant. Elle en a déjà un, et pourtant, elle l’abandonne comme ça. Tsk… C’est inacceptable. »
Munir hocha simplement la tête, les yeux fermés, se conformant à sa somnolence.
« Oi, réveille-toi ! » Encore une fois, Ramlah a tapé l’épaule de Munir. Cette fois, elle a même pincé son ventre.
« Maman, ça fait mal… Qu’est-ce que tu veux de plus… ? »
« Ça… Pourquoi as-tu décidé tout d’un coup de revenir ? Je te connais bien. S’il n’y a rien, alors tu ne reviends pas. Si tu es pressé de revenir, c’est qu’il doit y avoir un problème. Quel est le problème ? Tu t’es disputé avec Suraya ? Pas besoin d’expliquer. Quoi qu’il arrive, je serai du côté de Suraya. »
« Ah oui ? Qui est ton enfant ? Moi ou elle ? »
« Je le devine déjà. Chaque fois que vous vous disputez, c’est toujours de ta faute. C’est parce que tu es mon enfant que je le sais. Ta personnalité est affreuse. Suraya est une si bonne personne. Si vous vous battez, c’est certainement toi qui en es la cause. Je connais Suraya. Elle ne cause jamais de problèmes. C’est toujours toi. Toujours ! »
Munir l’a ignorée. En vérité, il ne peut s’empêcher de hocher intérieurement la tête en entendant les paroles de sa mère.
« Hah. Alors tu t’es vraiment battu avec Suraya ? »
« Non. »
« Vraiment ? »
« Oui… Nous allons bien. »
« Hmm… C’est bien. Je te conseille de prendre bien soin de Suraya. Ce n’est pas évident de trouver une femme qui est prête à supporter ta personnalité. Colérique, égoïste, grossier, insensible… »
« Autre chose ? » Munir est intervenu.
« Tu te moques de moi ? Pour résumer, puisque quelqu’un s’intéresse à toi, occupe-toi d’elle correctement. Surtout quelqu’un d’aussi parfait que Suraya. Elle a un bon visage et une bonne personnalité, contrairement à toi. Même si tu as un bon visage, ta personnalité… Bonté divine… »
« Eheh… Dis-tu que je suis beau ? » Munir a taquiné en souriant.
« Ouais. Aussi beau qu’une armoire. Assez. Va dormir. Lave tes pieds. Je te réveillerai pour la prière du subuh », Ramlah a retourné la taquinerie de son fils avec une brûlure maladive.
« Comme une armoire, dit-elle… » Se plaignit Munir, seul. Ramlah sourit avec satisfaction. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas taquiné son fils. Cela lui manquait beaucoup.
Munir ouvrit les yeux. Il regarda vers la gauche. Le siège du passager était vide. Adib n’était pas là. Munir descendit de la voiture et se dirigea vers le milieu de la route. La femme était toujours là. Debout et courbée, la tête tournée vers le bas. Adib était à côté d’elle, tenant la main de cette mystérieuse femme. Munir s’est approché des deux. Il a tiré la main d’Adib, mais ce dernier ne voulait pas lâcher la main de la femme. Munir a tiré plus fort. L’action de Munir a fait lever la tête de la femme et elle cria fort, assourdissant les oreilles de Munir. Munir s’est couvert les deux oreilles. La femme a continué à crier avec sa bouche grande ouverte. Si, grande qu’elle montrait ses dents noires et sa langue sanglante. Son cri était de plus en plus perçant. Plus il durait, plus il devenait long, jusqu’à ce que finalement le corps de la femme soit illuminé par le feu, léchant du sommet de sa tête jusqu’au bas de ses pieds. La femme se débattait à l’agonie. Ses hurlements ont presque fait tomber Munir de terreur.
« Arrgggghhhh ! !! »
« Munir… Munir ! Réveille-toi ! »
« Hah ? ! Maman, où suis-je ? »
« Dans ta chambre. Tu rêvais… Viens, lève-toi. Istighfar. C’est presque l’aube. Lève-toi et prie. »
Munir s’est assis et a senti son corps. Il était trempé de sueur. Il a essuyé son front et son cou qui brillaient de sueur froide. En regardant à sa droite, Adib était profondément endormi. Munir ajusta la couverture et couvrit correctement le corps d’Adib avant de descendre du lit et de se rendre dans la salle de bain pour faire ses ablutions.
« De quoi as-tu rêvé ? Il semble que ce soit un mauvais rêve », a demandé Ramlah après avoir terminé la prière du subuh avec son fils.
Munir a hésité à répondre.
« Je ne suis pas sûr… »
« Qu’est-ce qui t’es arrivé hier ? »
« Pourquoi tu demandes ça ? »
« Juste parce que… »
Munir est resté silencieux pendant un moment…
« J’ai presque renversé une femme au milieu de la route. Quand je suis allé la chercher, elle n’était pas là. Elle était partie. »
Ramlah était silencieuse, son visage était sérieux.
« Pourquoi tu fais cette tête, maman ? Ce n’est rien. C’est probablement quelqu’un à qui il manque un boulon… » A poursuivi Munir en remarquant que le visage de sa mère changeait après avoir écouté son histoire.
Munir se lève et plie le tapis de prière. Quand il est passé devant sa mère, elle a soudainement attrapé sa main. Elle la tient avec une poigne d’étau.
« Maman, qu’est-ce qui ne va pas ? » Demande Munir qui est choqué par le geste de sa mère.
« Je veux juste te rappeler. Nous ne sommes pas les seuls dans ce monde. Parfois, les humains sont trop arrogants, ils pensent que ce monde n’est qu’à eux. »
Munir s’est senti bizarre en entendant cette déclaration.
« De quoi parles-tu ? De fantômes ? » A demandé Munir sans détour.
» Va surveiller le petit… Peut-être est-il déjà réveillé « , changea Ramlah de sujet. Elle a lâché la main de Munir et a attrapé un Coran à côté d’elle. Le livre saint était ouvert à une page marquée d’un signet. Munir a observé le comportement étrange de sa mère sans rien dire. Il ne sait pas comment réagir.
Munir est allé dans sa chambre pour voir comment allait Adib. En ouvrant la porte, il a entendu les voix de quelqu’un qui parlait. Plus étrange encore, l’une des voix ressemblait à celle d’une femme. Munir a rapidement ouvert la porte. Il a vu Adib assis sur le lit, les jambes croisées. Comme s’il y avait quelque chose en face de lui.
« Adib, à qui parlais-tu ? »
« Avec ma mère… »
« Mais ta mère n’est pas là. »
« Oui. Elle est partie. Elle avait peur que tu la voies », dit Adib en montrant la fenêtre.
Munir n’a pas tardé à changer son regard vers la fenêtre qui claquait, soufflée par le vent du matin.
C’était le quatrième jour que Munir passait dans sa ville natale. Bien sûr, la plus heureuse était Ramlah, car son fils ne restait habituellement qu’un jour ou deux avant de partir. Cependant, elle ne se plaignait jamais, car elle comprenait l’emploi du temps serré de Munir en tant qu’officier de police.
Malgré cela, elle se sentait un peu bizarre, car il ne lui avait toujours pas dit la raison de son retour. Il ne parlait pas beaucoup avec Ramlah non plus. Comme s’il évitait quelque chose. Tout ce temps, il l’a passé principalement avec Adib qui, après avoir été ensemble pendant quelques jours, s’est finalement rapproché d’eux.
Après avoir pris une douche et changé de vêtements, Munir a peigné les cheveux d’Adib et lui a mis un peu de poudre sur le visage. Munir était un enfant unique. Il voulait un petit frère depuis longtemps et peut-être que son âge, 27 ans, l’incitait penser à une famille et à un enfant. Vouloir son enfant, c’était jusqu’à présent une chose incertaine qui viendrait avec le temps. Il y avait bien sûr des candidats. Suraya attendait patiemment. L’argent n’était pas un problème. Plus qu’assez, en fait, mais Munir n’était toujours pas prêt. Lui-même ne savait pas pourquoi. Il savait qu’il n’était toujours pas prêt pour le mariage.
Après avoir fini de peigner les cheveux d’Adib, ce dernier a rapidement sauté sur le lit et a attrapé le livre d’histoires que Munir avait vu depuis le premier jour où il avait rencontré Adib. Le livre ne l’a jamais quitté. Il utilisait même le livre épais comme oreiller.
« Quel livre lis-tu, Adib ? Je vois que tu es si absorbé… »
Adib a regardé Munir avec un regard acéré. Puis il a souri avec cynisme.
« C’est une collection d’histoires d’horreur… » Répondit-il.
« Je peux y jeter un coup d’œil ? » Demanda Munir.
Adib secoue la tête.
« Pourquoi ? »
« Je n’ai pas encore fini de le lire. S’il te plaît, prends un numéro et attends ton tour… »
Munir a ri.
« Non. Je vais juste jeter un coup d’œil. Je ne vais pas le lire. Je te le rendrai immédiatement après… »
Adib était encore hésitant, ce qui rendait Munir méfiant.
« Adib… Je te le demande gentiment. Peux-tu me le prêter pour un moment ? » Demande Munir en tendant la main pour prendre le livre.
Adib a cédé. Il tend le à Munir. Munir continue à regarder ce livre. La couverture était noire, sans écriture ni image. Munir se tourne vers le dos du livre. Il n’y a même pas de synopsis. Munir regarde alors ce qu’il y a à l’intérieur. Il fut choqué de voir que tout ce qui était à l’intérieur était écrit à la main.
« Où as-tu trouvé ce livre, Adib ? »
Adib a haussé les épaules. La même réponse pour de nombreuses questions qui lui étaient adressées.
Voyant la bizarrerie du roman, Munir a décidé d’enquêter d’abord sur son contenu avant de permettre à Adib de poursuivre sa lecture. Ce n’est pas grave. Il craignait juste qu’il contienne des choses inappropriées pour les enfants. Surtout pour un roman d’horreur. Il pourrait y avoir des scènes un peu trop extrêmes. Il avait peur qu’Adib ne puisse pas dormir parce qu’il avait trop peur. Munir savait qu’Adib parlait parfois tout seul, surtout la nuit. Peut-être qu’Adib a été influencé par le roman, ce qui renforce la décision de Munir de vérifier le roman avant de permettre à Adib d’en lire davantage.
Au début, Adib s’est rebellé lorsque Munir lui a « confisqué » le roman. C’était comme s’il avait un lien spécial avec celui-ci. Comme si c’était trop dur pour lui de s’en séparer.
« Laisse-moi d’abord jeter un coup d’œil. Je veux voir, si tu peux le lire. Quand j’aurai fini, je te le rendrai. Je te le promets », dit Munir. Adib se contenta de le regarder avec des yeux injectés de sang.
Munir se dirigea vers la véranda. Avec une tasse de café et un paquet de chips, il commença à lire le vieux roman…
[1] Salutations musulmanes, signifiant « Que la paix soit avec toi ».
[2] Réponse typique à Assalamualaikum.
[3] Foulard utilisé par les femmes musulmanes pour cacher leurs cheveux.
[4] Demander le pardon d’Allah en récitant l’istighfar pour les péchés commis. Les choses malheureuses se produisent en raison de la punition divine infligée au pécheur.
[5] Verset récité pour s’éloigner des êtres surnaturels. Utilisé dans d’autres situations également, mais je n’irai pas plus loin, car cela n’a rien à voir avec la situation actuelle.
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Note trad anglais :
Ce livre est le premier de la trilogie Jangan baca Novel Ini/Don’t Read this Novel. Il s’agit principalement de nouvelles avec une intrigue principale qui les relie un peu entre elles. Je ne vais pas entrer dans les détails à cause des spoilers.
Alors, oui. J’espère que vous avez apprécié cette première version. Merci de m’avoir lu et j’espère que vous continuerez ce voyage avec moi jusqu’à la fin.