Tome 6 – Chapitre 56 – Les inquiétudes d’Aiko
Q : tu es tombé de ce pont, que s’est-il passé après ?
R : J’ai fait de mon mieux.
Q : Pourquoi tes cheveux sont-ils devenus blancs ?
R : C’est parce que j’ai fait de mon mieux.
Q : Qu’est-il arrivé à ton œil ?
R : C’est parce que j’ai vraiment fait de mon mieux.
Q : Pourquoi n’es-tu pas revenu immédiatement après ?
R : Je n’avais aucune raison de le faire.
« S’il te plaît, réponds-nous sérieusement ! » cria Aiko de colère avec ses joues gonflées suite au réponses de Hajime
Qu’elle soit incapable de montrer une quelconque intensité dans cette action était triste. Comme d’habitude, Hajime ressemblait à un saule quand le vent soufflait. Sans la regarder, il dégustait délicieusement le Nilshiseer, tout en écoutant parfois la querelle de Yue et Shia. Son visage était rempli de satisfaction.
Le commandant des gardes du corps d’Aiko, David, était furieux. Il ne supportait pas d’être ignoré par la femme dont il était amoureux.
« Oi, toi ! C’est Aiko qui te le demande ! Réponds-lui sérieusement ! » cria-t-il en jetant son poing sur la table d’où un son fort retentit.
Hajime jeta un coup d’œil à David.
« Haa », soupira-t-il.
« On mange. Tiens-toi bien. »
Sa protestation a été complètement ignorée. Cependant, David a une grande fierté. En tant que Chevalier du Temple, on lui a confié le commandement de la garde rapprochée d’une personne importante. Son égo ne le supporta pas et son visage est devenu rouge. Puisque que Hajime ne lui donnait pas de réponse claire, il changea de cible en se tournant vers Shia.
« Hmm, « Tiens-toi bien » dis-tu ? Ces mots, je te les renvoie. Que ce sale animal partage la même table que les humains, c’est toi qui n’a pas de manières. Devrais-tu pas au moins couper ces affreuses oreilles ? Elle aura l’air plus humaine sans. »
Le corps de Shia tremblait tandis qu’on la fixait avec des yeux pleins de dédain. Dans la ville de Brook, elle avait été proche de Catherine, et du côté de Hajime, il y avait plein de gens aimables. Bien qu’il y ait eu beaucoup de regards discriminants à Fhuren, et même s’ils l’ont reconnue comme une esclave, personne ne s’est directement moqué d’elle.
Depuis le début de son voyage avec Hajime, c’était la première fois qu’elle recevait directement des mots discriminatoires en tant que demi-humaine. Bien qu’elle ne voulait pas y penser, elle a été légèrement surprise par l’attaque. Même si elle s’était habituée au monde extérieur, ces mots lui firent se sentir mal. Shia a baissé les yeux d’un air déprimé.
En regardant attentivement, elle vit que ce n’était pas seulement David. Chase et les autres Chevaliers regardaient également Shia avec les mêmes yeux. Peu importe l’intimité qu’ils avaient avec Aiko et ses élèves, ils étaient des Chevaliers du Temple et de l’Empire. Ils étaient des hommes de l’Église des Saints et du Royaume. Leur discrimination envers la race des demi-hommes était donc forte. Après tout, l’Église des Saints et le Royaume leur apprennent ce comportement. Même influencés par Aiko depuis quelques mois et capable de penser par eux-mêmes, rien n’aurait changé car ce sens des valeurs n’était pas superficiel.
Parce que c’était déraisonnable, Aiko a instinctivement essayé de protester. Immédiatement, Yue saisit la main de Shia, dirigea un regard aussi froid que le zéro absolu vers David. Ce regard froid, qui pouvait geler le corps d’une personne, venait d’une belle fille de classe supérieure, ressemblant à une poupée de cire. David a tressailli un instant, et devint furieux vu que la pression venait d’une fille ayant l’apparence d’un enfant. D’habitude, il ne perdait pas facilement son sang-froid, mais suite aux mots qu’il venait de prononcer, et en regardant sa chère Aiko, il avait perdu les pédales.
« Quoi, c’est quoi ces yeux ? C’est grossier ! Même si tu n’es pas un apôtre de Dieu, tu essaies de t’opposer à un Chevalier du Temple ! »
David s’est spontanément levé. Bien que le vice-commandant Chase ait essayé de l’arrêter, les mots de Yue ont rapidement résonné dans ce tumulte.
« …Un petit homme. »
Ce sont des mots de dérision. Des mots qui disent à quel point son existence était minable, à crier juste à cause d’une différence de race, et à perdre son sang-froid quand une fille le dévisageait. David était déjà en colère. En tant qu’homme, se faire traiter de petit devant Aiko l’a poussé à bout.
« … Espèce de païen. Je t’enverrai en enfer avec cet animal. » marmonna-t-il sans expression et en prenant son épée.
Ce carnage trop soudain a troublé les étudiants. Tandis qu’Aiko, Chase et les Chevaliers essayèrent de l’arrêter. Cependant, sans écouter les voix environnantes, David sorta légèrement l’épée de son fourreau.
Au même moment,
DOPANh !!
Un son sec et explosif résonna à l’intérieur de « l’Auberge de la Fée des Eaux ». David, qui était sur le point de bondir, a été frappé à la tête et s’est fait souffler. L’arrière de sa tête heurta violemment le mur derrière lui, et un son terrible résonna. Ses yeux devinrent blancs et il s’effondra. David lâcha son épée et gashan !, elle tomba sur le sol.
Personne n’était en capacité de comprendre ce qui venait d’arriver, et tous étaient stupéfaits. Leurs regards se tournèrent vers David, effondré au sol avec le blanc de ses yeux visible. Puis Foss, curieux de ce bruit étourdissant et explosif, tira le rideau. Il écarquilla les yeux, abasourdi par la scène désastreuse qui se déroulait devant lui.
De l’autre côté, Aiko et les autres reprirent finalement leurs esprits lorsque Foss est entré. Leurs regards, qui étaient alors dirigés vers David, ont naturellement été attirés par la source du son explosif.
À cet endroit se trouvait quelque chose dont Aiko et ses élèves avaient connaissance, mais qu’ils n’avaient jamais vu. C’était un objet de l’autre monde, un objet de complètement inconnu des Chevaliers. Ils virent la silhouette de Hajime tenant un « pistolet » en position assise. De la fumée blanche sortait de Donner. Au moins, la balle tirée était une balle en caoutchouc non mortelle.
Sans connaître les détails, les Chevaliers devinrent qu’il s’agissait d’une attaque de Hajime, ils ont donc simultanément posé leurs mains sur leurs épées avec l’intention de tuer. Cependant, il sentirent immédiatement après une violente intention de tuer incomparable à celle des Chevaliers. C’était similaire à une attaque d’un marteau tombé du ciel. Les Chevaliers qui se levaient, furent contraints de se rasseoir sur leurs sièges.
Bien qu’ils n’aient pas été la cible de l’intention de tuer, ayant senti la pression émise par Hajime, Aiko et les autres sont devenus pâles et tremblants.
Hajime a posé Donner sur la table ‘gotoh’, ce bruit était anormal. Son but était de les menacer.
« Je n’ai rien à battre de vous.” déclara Hajime. “Je n’ai jamais pensé à entretenir une relation avec vous. De plus, je ne dirai rien de ce qui m’est arrivé ou de ce que je veux faire. Je ne suis ici que pour le travail, je reprendrai donc mon voyage une fois qu’il sera terminé. C’est là que nous nous disons au revoir. Aussi, n’intervenons pas les uns auprès des autres. Peu importe le genre d’actes égoïstes que vous voulez faire, ne me gênez pas. Si vous redevenez hostile… je vous tuerai probablement. »
Avez vous bien compris ? demandèrent les yeux de Hajime
Personne ne rompit le silence.
Puis, il tourna son regard vers Chase et les Chevaliers, qui enduraient désespérément la Pression. Ils ne purent que hocher légèrement la tête.
Son regard se tourna ensuite vers Aiko et ses élèves. Aiko ne rompit pas le silence. Non, c’est plutôt qu’elle ne pouvait pas. Elle restait muette devant la pression qui montait, mais surtout à cause des mots d’Hajime, et de la façon dont son élève avait changé sans qu’elle le sache. La fierté d’Aiko ne pouvait le permettre.
Hajime soupira avec un haussement d’épaules et annula la « Pression ». Bien que Aiko n’a pas répondu, Hajime compatissait à ses sentiments, il ne la força donc pas à répondre. Les autres élèves étaient visiblement effrayés, il devina qu’ils n’oseraient pas le défier.
L’énorme sentiment d’oppression ayant disparu, les Chevaliers s’effondrèrent et poussèrent un profond soupir. Aiko et ses élèves étaient également épuisés et se sont assis sur les chaises. Comme si rien ne s’était passé, Hajime a repris son repas et a parlé à Shia, dépité.
« Oi, Shia. C’est quelque chose de normal ‘là-bas’. Il n’y a pas besoin de le prendre au sérieux, OK ? »
« Oui, c’est vrai… Bien que je comprenne que,… pour les humains, ces oreilles sont dégoûtantes. »
Avec autodépréciation, Shia a tapoté ses oreilles avec ses mains et a laissé échapper un sourire amer.
« …Les oreilles de Shia sont adorables. » murmura Yue avec des yeux honnêtes
« Yue-san… C’est vrai ? »
Même ainsi, Shia n’était toujours pas convaincue, alors cette fois Hajime a suivi avec une expression quelque peu surprise. Parce que Yue lui disait souvent « Mauvais ! », l’attitude de Hajime envers Shia s’était progressivement adoucie.
« Tu sais, leur système éducatif leur font pratiquement subir un lavage de cerveau de la part de l’Église et des nobles du Royaume, alors c’est juste un sentiment d’aversion. Sais-tu que la tribu des hommes-lapins est le numéro un des esclaves de compagnie les plus populaires ? En d’autres termes, personne ne vous considère comme dégoûtant. »
Shia s’est sentie légèrement heureuse par ces mots de réconfort venant de Hajime.
« C’est… c’est vrai… …U-umm, au fait Hajime-san,… Hum… que pensez-vous… de mes oreilles ? » demanda-t-elle en levant les yeux, les joues rougissantes.
Son regard disait « Je veux savoir, mais en même temps je ne veux pas », ses oreilles de lapin s’affaissaient complètement, et parfois elles tressaillaient vers Hajime.
« … Je ne pense rien d’eux… » répondit-il d’une manière hargneuse pour la tromper.
Jetant un coup d’œil aux oreilles de lapin, Hajime retourna son regard vers son repas. Les oreilles de lapin s’affaissèrent encore plus, comme si elles regrettaient d’avoir posé la question.
« … Ce sont les préférés de Hajime. Il les cajole quand Shia dort. » répliqua Yue
Les oreilles de lapin immédiatement retrouvaient leur énergie en se levant ; hyupa !.
« Yue !? Tu m’avais promis de ne pas lui dire! ? »
« Ha-Hajime-san… tu aimes mes oreilles de lapin…. Ehehe. »
Avec ses joues teintes en rouge, Shia essayait de réprimer son fou rire avec ses deux mains, et comme si elle disait « Wa~i ! », ses oreilles de lapin au-dessus bougeaient, exprimant son plaisir.
L’atmosphère maladroite et tendue d’abattage qui flottait dans l’air s’était immédiatement dissipée comme une illusion. L’atmosphère avait mystérieusement viré au rose, de sorte qu’Aiko et ses élèves, et même les Chevaliers, clignèrent des yeux d’étonnement. Ils ont observé un long moment l’interaction amoureuse et comique d’Hajime.
« Huh ? Comme c’est étrange. Jusqu’à présent, Nagumo était vraiment effrayant, mais maintenant, aucune intention de tuer ne jaillit… », marmonna l’un des élèves masculins, Aikawa Noboru.
« Vous aussi, hein. Ces deux-là, bien qu’elles soient dangereusement mignonnes,… bien qu’ils soient tous dans ma zone de frappe,… Ils flirtent devant mes yeux. C’est une torture pour moi… »
« … C’est comme l’a dit Nagumo, ça n’a pas d’importance. Mais, s’entendre avec des filles d’un autre monde… Je veux lui demander comment il fait ! Noboru ! Akira !
« Heh, nous irons en enfer ensemble, Atsushi ! »
Les yeux bouillants d’envie, ils fixaient le Hajime qui les faisait maintenant frémir ; c’était l’unisson de trois mâles des gardes du corps d’Ai-chan. L’atmosphère sérieuse s’envola complètement. Les étudiantes ont commencé à retrouver leur aisance, et ont regardé leurs confrères masculins avec des yeux terriblement froids.
Chase, ayant réalisé que l’atmosphère s’était calmée, commença à soigner David. Sa prudence et son hostilité étant atténuées, il posa une question à Hajime avec un sourire. Il y avait quelque chose qu’il devait entendre par tous les moyens.
« Est-ce que je peux vous appeler Nagumo-kun ? A propos de tout à l’heure, mon commandant a été impoli. Quoi qu’il en soit, nous sommes juste les gardes du corps d’Aiko-san, donc nous devenons trop sensibles si cela concerne Aiko-san. J’aimerais que vous nous pardonniez. »
Hajime voulait l’interrompre et lui dire, « Comment l’hypersensibilité peut-elle se transformer en meurtre ? », mais le mot « meurtre » lui-même l’avait rendu incapable de dire quoi que ce soit.
C’est pourquoi il a juste agité silencieusement la main pour lui dire d’arrêter ça. À cause de cette attitude superficielle, les sourcils de Chase se sont légèrement contractés, mais le sourire sur son visage impassible ne s’est pas effrité. Parce qu’il ne pouvait pas en rester là, il parla de l’objet d’Hajime ressemblant à un artefact.
« Je suppose… que c’est un artefact. Bien que je ne puisse pas en être sûr avec mes connaissances limitées, je peux voir que c’est un puissant objet. Il est beaucoup plus rapide qu’un arc, il n’a pas besoin d’être chanté ou d’avoir un cercle magique. Mais où l’avez-vous trouvé ? »
Bien qu’il souriait, les yeux de Chase ne le montraient pas. À en juger par ses paroles, sans la présence de magie, il pensait que cet objet avait un mécanisme physique pur semblable à un arc et qu’il pouvait être produit en masse. Si c’est le cas, cet objet serait d’une grande aide pour dominer les ennemis avant même que la guerre n’éclate. Cependant, les Chevaliers ne pouvait pas lutter contre Hajime, donc il voulait au moins obtenir des informations.
Hajime croisa le regard de Chase. Avant qu’il ne puisse dire quoi que ce soit, ils ont été interrompus par une voix excitée.
« C’est… c’est vrai, Nagumo. C’est un pistolet, non ? Comment tu l’as eu ? » lui demanda Tamai Atsushi, un camarade de classe,
Chase a réagi au cri de Tamai.
« Un pistolet ? Tamai, tu t’y connais ? »
« Eh ? Ah, oui, j’en ai entendu parler. C’est une arme de notre monde. »
Les yeux de Chase ont brillé suite aux mots de Tamai. Il fixa ensuite Hajime.
« Hou, en d’autres termes, ce n’est pas un artefact de ce monde… Si c’est le cas, il doit être fabriqué par quelqu’un d’un autre monde… et bien sûr, le fabricant est… »
« C’est moi. » répondit Hajime
Chase, qui avait l’impression que Hajime était une personne secrète, a été surpris par la facilité avec laquelle il l’a admis.
« Vous l’admettez si facilement. Nagumo-kun, savez-vous ce que cela signifie de tenir cette arme ? C’est… »
« Elle pourrait complètement changer la situation de la guerre dans ce monde,… n’est-ce pas ? A condition de pouvoir la produire en masse. C’est pourquoi, vous voulez que je revienne et que je vous apprenne à la fabriquer, ou quelque chose comme ça ? Naturellement, je rejette tout. Abandonnez. »
Les mots d’Hajime l’avaient laissé complètement impuissant. Ces mots semblaient avoir été préparés à l’avance. Mais, Chase n’a pas abandonné. C’est-à-dire à quel point l’arme était attirante.
« Mais, les Soldats de faible niveau peuvent avoir des offensives élevées si cet objet pouvait être produit en masse. Lorsque cela se produira, beaucoup de personnes pourront participer dans la guerre à venir, et nos chances de victoire augmenteront aussi considérablement. Si vous coopérez, n’aidez-vous pas également votre professeur et vos amis ? Si c’est le cas… »
« Peu importe vos dires, je ne coopérerai pas. Si vous essayez de le prendre, alors vous serez mon ennemi. À partir de là… soyez prêt à mourir avant même que la guerre n’éclate. »
Les mots calmes de Hajime ont jeté un froid dans tout le corps de Chase et il s’est tu.
« Chase-san. Nagumo-kun a ses propres intentions.” réussi à intervenir Aiko. “S’il te plaît, ne force pas mon élève. Nagumo-kun aussi, arrête de dire des choses aussi extrêmes. Sois plus pacifique… Nagumo-kun, tu ne vas vraiment pas revenir ? »
« Ah, je ne veux pas rentrer avec vous. Demain matin, après avoir complété la demande, je partirai tel quel. »
« Pourquoi… »
Aiko a regardé Hajime avec une expression peinée, elle voulait connaître sa raison, mais Hajime s’est levé de son siège avant qu’elle puisse lui demander. À leur insu, Yue et Shia avaient également terminé leur repas. Bien qu’Aiko ait essayé de l’arrêter, Hajime l’a ignoré et a grimpé les escaliers jusqu’au deuxième étage, accompagné de Yue et Shia.
Au moment où Aiko et les autres ont été laissés derrière, une atmosphère subtile et indescriptible était dans l’air. Ils étaient heureux que leur camarade de classe mort soit en fait vivant. Mais, la personne elle-même, n’était plus reconnaissable. De plus, il était devenu fort au point qu’il était impossible de le comparer à son ancien lui. Il n’était plus celui qu’on regardait de haut et qu’on appelait autrefois « incompétent » avec mépris.
D’ailleurs, à propos du mépris, ils avaient fait semblant de ne pas remarquer qu’Hiyama et ses amis les malmenaient. Après l’incident du « tir ami », ils se sentirent plus redevables à cause de l’attitude ambiguë d’Hajime. Par conséquent, personne n’a pu prendre l’initiative de l’interpeller.
Aiko elle-même était grandement secouée par le changement de son élève et irritée par l’état actuel dans son esprit, elle était donc incapable d’arrêter Hajime.
Chase, tout en regardant le David en train de se rétablir sur le côté, semblait réfléchir..
Avec leurs repas complètement refroidis, leurs appétits ont également disparu. Sans regarder la nourriture en face d’eux, ils ont tous commencé à penser profondément à la façon dont « Hajime a survécu » après son départ.
Qu’est-ce qui pouvait autant changer un homme, que pensait Hajime lors de l’incident du « tir ami », que pensait l’actuel Hajime d’eux… Très probablement, il leur en voulait. Avec ces pensées révolutionnaires à l’esprit, tous déprimèrent, et la journée se termina.
* * *
Au milieu de la nuit.
Entourés par la nuit, ils étaient complètement épuisés. A la fois physiquement et mentalement, à cause des événements inattendus. Ils s’endormirent tous, sauf Aiko incapable de dormir. La chambre d’Aiko était une chambre individuelle, et donc pas très grande. Il y a un ensemble de table, un lit avec des pieds en bois sculpté, une petite cheminée et un canapé en cuir en face d’elle. En hiver, la flamme illuminerait sûrement la pièce, et les clients de l’auberge seraient réchauffés rien qu’en la regardant.
Aiko pensait aux derniers évènements de la journée, elle regardait la cheminée éteinte tout en confiant son corps au canapé. Ses pensées étaient désordonnées comme une étagère non rangée, avec toutes ces informations en bordel.
Même si elle ne pouvait pas y réfléchir, elle voulait y penser. Et à partir de là, sa tête qui tournait en rond n’émettait plus aucune opinion constructive. Elle se souvenait d’avoir souri lorsqu’elle avait appris que son élève était vivant, puis d’avoir froncé les sourcils à cause de son attitude inamicale.
Elle avait aperçu la puissance d’Hajime à travers le discours et la conduite de David, il n’aurait pas été capable de survivre s’il n’avait pas changé. Combien d’épreuves avait-il dû subir ? À ce moment-là, elle laissa échapper un soupir, se sentant impuissante. Cependant, vu ses interactions avec les deux filles, il avait dû trouver des compagnons de confiance. Et à cette idée, elle sourit à nouveau.
Soudain, une voix retentit à l’intérieur de la pièce qui lui était dédiée.
« Pourquoi changez-vous sans cesse votre expression, sensei ? »
« Kh ! ? »
Aiko se retourna vers la source de la voix en écarquillant les yeux. Hajime se tenait à la porte d’entrée, les bras croisés. Aiko était tellement surprise qu’elle s’est retrouvée muette un court instant.
« Na-Nagumo-kun ? P-pourquoi es-tu là, comment… »
« Même si vous vous demandez comment, je suis juste passé par la porte, ni plus ni moins. »
« Eh, mais la serrure… »
« Ma classe est maître en transmutation, rappelez-vous ? Contrairement aux serrures sur terre, je peux ouvrir ce genre de mécanisme. »
Le fait que Hajime lui réponde stupéfia Aiko pendant un moment. Elle réussit à calmer son cœur qui avant cela, battait fort sous l’effet de la surprise. Elle a froncé les sourcils.
« En pleine nuit ! Il est aussi impoli de faire soudainement irruption dans la chambre d’une femme sans même frapper. Ouvrir volontairement la serrure… Que veux-tu ? » critiquait-elle
Pendant un instant, le mot yobai est venu à l’esprit d’Aiko mais elle écarta immédiatement cette pensée. Elle secoua légèrement la tête en se rappelant que son interlocuteur était son élève. Hajime repoussa les réprimandes d’Aiko en un coup de vent, et annonça la raison de cette visite irréfléchie.
« Eh bien, je suis désolé pour le dérangement. Je voulais que personne ne soit au courant de ma visite. Je veux vous parler, sensei, mais sans les hommes de l’Église et du Royaume, je n’ai pas pu le faire avant. Après tout, le contenu de cette discussion aurait pu les mettre en colère. »
« Une discussion ? Nagumo-kun, c’est bon si tu en parles à sensei et au autres… »
Par hasard, Aiko pensa qu’il voulait rentrer avec eux, et ses yeux brillaient dans l’expectative. Si son élève venait la consulter, alors cette pièce était le bureau d’un professeur. Mais ses attentes ont été immédiatement démenties par Hajime.
“Non, je ne souhaite pas revenir. Alors arrêtez de me regarder avec ces yeux remplis d’attente… La raison de ma visite demande à ce que sensei soit calme et prête à écouter. Après cette discussion, je vous laisserai décider de ce que vous voulez faire. »
Hajime commença à parler de l’histoire d’Oscar sur les « Libérateurs » et les Dieux fous.
Hajime avait évidemment ses propres raisons de raconter cette histoire à Aiko. Selon les intentions des Dieux, les héros ; Kouki et les autres, étaient invoqués pour faire partie de leur jeu, et les Dieux n’ont jamais eu l’intention de les renvoyer dans leur propre monde. Sauver la race humaine de la race démoniaque, et donc gagner la guerre à venir, est une machination des Dieux qui tirent les ficelles. Les héros ne sont que des pièces intéressantes qu’ils avaient rassemblées sans véritable raison. Au contraire, ces nouvelles pièces sont plus appropriées pour commencer un nouveau jeu.
Cependant, Hajime n’a pas d’intérêt à tout expliquer à Kouki et aux autres élèves. Il n’était pas intéressé par les actes de ses camarades, et ils ne feraient que l’embêter. Même s’il le lui disait, cet homme qui pensait que la justice était toujours du côté de la majorité ne le croirait pas.
Parce qu’il était à mi-chemin entre ce garçon qui avait radicalement changé et celui qui demandait de sauver la majorité, il ne chercha pas à qui donner sa confiance. Au contraire, parce que beaucoup de gens croient et vénèrent « Ehito-sama », il ne serait que moqué et critiqué. Pour cette raison, Hajime ne voulait pas, le moins du monde, être lié à Kouki.
Cependant, coïncidence après coïncidence, il a rencontré Aiko. Hajime savait que les principes fondamentaux d’Aiko étaient toujours centrés sur ses élèves. Ainsi, quelles que soient les circonstances dans cet autre monde, elle prendrait calmement une décision pour le bien de ses élèves. A en juger par l’attitude de ses camarades de classe, et la façon dont ils se languissaient du Japon, ses mots prononcés par Aiko seraient sûrement capables de les influencer. Telles étaient les pensées de Hajime.
Bien qu’il ne sache pas comment son influence pourrait changer leurs actions. Avec cette information, si les actes de Kouki et des autres deviendraient différent de ce que les Dieux avaient prévu, ces Dieux porteraient sûrement plus d’attention à Kouki et aux autres. Hajime savait qu’il se ferait remarquer en partant à la conquête des Grands Donjons, et il pourrait recevoir des interférences de la part des Dieux. En transmettant indirectement l’information par l’intermédiaire d’une personne de confiance, il pouvait ainsi réorganiser les actions de Kouki et des autres. Ainsi, il retardera l’attention des Dieux à son égard. Son seul objectif était de les détourner de lui.
Son but était de chercher différentes façons de les faire revenir sans l’aide des Dieux. Tout comme les « Libérateurs », il voulait aussi montrer à Kouki et aux autres comment leurs alliés d’origine sont devenus des ennemis manipulés. Son intention était de semer une méfiance envers ces Dieux.
Cependant, il a pensé à cette idée suite à la rencontre fortuite avec Aiko, donc Hajime n’en attendait rien. Il n’y avait ni rancune ni haine envers ses camarades de classe. Il était juste indifférent à leur égard. S’ils pouvaient être utilisés, alors il les utilisait, et il les laissait tranquilles s’ils ne s’avéraient pas utiles. Ce ne fut pas un hasard si il leur divulgua cette information.
Ayant entendu la vérité de ce monde, Aiko était abasourdie. Sans savoir si elle a vraiment tout compris. En traitant cette information, peu importe le genre d’idées qu’elle avait, cela lui prenait plus de temps.
« Eh bien, voilà. C’est ce que j’ai appris dans les profondeurs de l’Abîme. Je laisse à sensei le soin de décider de ce qu’il faut faire. C’est normal de penser que ce ne sont que des absurdités, et c’est aussi normal de passer à l’action si vous pensez que c’est la vérité. Faites comme bon vous semble. »
« Na-Nagumo-kun, ne me dit pas que c’est pour faire face à ces « Dieux fous »… tu as commencé ton voyage ? »
« Hah, impossible. Je sens du plus profond de mon cœur que ce qui arrive à ce monde n’a pas d’importance. Je cherche seulement une méthode pour revenir. D’où le voyage. Je vous l’ai raconté, car je pense que c’est pratique de le faire, voilà tout. » ricana-t-il
Aiko a affiché une expression indescriptiblement subtile. Bien qu’elle ait été soulagée qu’il ne se soit pas précipité dans le danger, elle fronça les sourcils en tant que professeur en raison de la facilité avec laquelle il rejetait les autres. Mais, ses élèves étaient sa première priorité dans ce monde, donc elle ne dit rien en retour. Elle essaya de changer de sujet avec une expression subtile.
« Est-ce que tu crois en tout ça ? »
« Oui. Les Grands donjons sont les clés. Vous pouvez les rechercher s’ils vous intéressent. Une fois le 100e niveau d’Orcus dépassé, vous trouverez avec bonheur le vrai Grand Donjon. Au vu de vos apparences d’aujourd’hui, vous mourrez immédiatement en vous y rendant. Il est impensable que vous ignorez une « Pression » de ce niveau. »
Aiko s’est souvenue de la pression qui jaillissait de Hajime à l’heure du dîner. Suite à cela, elle ouvrit des yeux remplis de sentiments complexes de sympathie, d’admiration et d’autres sentiments divers en repensant aux conditions difficiles qu’il avait dû vivre.
Pendant un moment, leur silence continua. La pièce était silencieuse. Hajime était certain que l’information était passée après avoir regardé Aiko. Et comme il n’avait plus rien à faire, il a immédiatement tourné les talons et s’est dirigé vers la porte.
« Shirasaki-san n’a toujours pas renoncé à toi. » lui rappela-t-elle
« … »
Hajime s’arrêta de marcher à cause des mots inattendus d’Aiko. Puis, Aiko a parlé doucement avec le dos de Hajime devant elle.
« Bien que tout le monde ait cru que tu étais mort, elle est la seule qui n’a pas renoncé à toi. Avant de le confirmer de ses propres yeux, elle croit que tu es toujours vivant. Même maintenant, elle se bat encore dans le Grand Donjon d’Orcus. Même si Amanokawa-kun et les autres ne vont au donjon que pour s’entraîner, son seul but est de te chercher. »
« … Shirasaki va bien ? » demanda Hajime après un long silence.
Hajime qui adoptait une attitude indifférente à leur égard, a commencé à s’inquiéter à propos d’une étudiante. Aiko découvrit que le Hajime original existait toujours et affichait une expression joyeuse.
« O-Oui. Bien que le Grand Donjon d’Orcus soit un endroit dangereux, ses capacités se sont bien développées, et elle continue à conquérir le donjon. Parfois, elle envoie des lettres. Es-tu curieux à son sujet ? Nagumo-kun et Shirasaki-san s’entendaient bien après tout. » parla-t-elle avec un sourire éclatant.
Hajime se contenta de regarder sans expression par-dessus son épaule sans rien nier ni affirmer.
« Je ne voulais pas annoncer ça comme ça… mais dites le lui dans vos échanges de lettres. Ce dont elle doit se méfier, ce ne sont pas les bêtes démoniaques du donjon. Mais de ses compagnons. »
« Eh ? Qu’est-ce que tu… »
« Sensei, je peux déjà deviner la situation d’après l’attitude de Tamai et des autres aujourd’hui. La cause de ma chute dans la bataille contre le Béhémoth, vous pensez que c’était juste un accident » … « , n’est-ce pas ? »
« C’est… Oui. La magie a échappé à tout contrôle et a provoqué un tir ami accidentel… Nagumo-kun en veut encore à tout le monde… »
« Je n’en veux pas à tout le monde. Ce que je veux dire, c’est ça. Un tir ami ? C’est faux. C’était une balle magique spécifiquement lancée pour me cibler. »
« Eh ? Spécifiquement lancée ? Cibler, tu dis ? »
L’expression d’Aiko disait qu’elle ne comprenait pas où il voulait en venir. Mais, Hajime a prononcé des mots qui ont impitoyablement poussé l’inquiétude d’Aiko plus loin.
« Cela signifie qu’un camarade de classe a essayé de me tuer. »
« Kh !? »
Aiko était abasourdie et son visage a pâli.
« Je sais seulement que le coupable est quelqu’un proche de Shirasaki, c’est quelqu’un qui est capable de tuer une autre personne par envie. Comme Shirasaki va bien, il faut lui conseiller de faire attention à ses arrières. » lui conseilla Hajime en sortant de la pièce.
Une illusion de vent froid soufflant à l’intérieur de la pièce s’installa, et Aiko étreint son propre corps avec ses deux bras. Il était possible que l’un de ses précieux élèves ait essayé de tuer un compagnon. De plus, ils ont utilisé une méthode lâche en visant son dos alors qu’il était au bord de la mort. Pour Aiko, qui chérissait ses élèves, c’était quelque chose qu’elle n’acceptait pas facilement. Mais, elle ne pouvait pas nier les mots de Hajime sans preuve. Son esprit qui voulait croire ses élèves et ces pensées se heurtait l’un à l’autre.
Avec ses inquiétudes croissantes, les nuits blanches d’Aiko ont augmenté.