Chapitre 62 – L’Intention de Tuer Partout
« Merci à tous pour votre renfort ! » Li Qingshan remercia Ye Dachuan, Huang Binghu et Liu Hong. Peu importait leurs intentions initiales en venant, l’aide restait de l’aide, et ils seraient récompensés avec le grenier, le dépôt et l’armurerie qui subsistaient de la forteresse du Vent Noir.
Quant au trésor, il était déjà extrêmement bien dissimulé. Désormais, la chaleur de l’incendie avait même endommagé la porte secrète. Pour y entrer à nouveau, il leur faudrait déblayer les ruines et retrouver l’emplacement exact pour forcer l’entrée.
Dans l’armée, chacun souriait d’une oreille à l’autre, désormais détendu. Au départ, ils s’inquiétaient, pensant qu’ils risquaient leurs vies face aux bandits de la montagne du Vent Noir. Maintenant, ils avaient remporté la victoire sans même tirer leurs épées et n’avaient qu’à emporter le butin sans la moindre blessure. C’était simplement formidable ! Ils pourraient s’en vanter à leur retour.
Ye Dachuan, Huang Binghu, Liu Hong et Li Qingshan se tenaient ensemble, observant les autres transporter les biens. Ils semblaient tous suivre Li Qingshan comme leur chef.
Hormis la gourde d’alcool accrochée à sa taille et l’épée du Dragon Sautant sur son dos, il portait désormais un pot en porcelaine à sa ceinture et un rouleau de peinture sur son dos.
Le pot contenait évidemment Xiao An. Il avait absorbé tant de sang d’essence des bandits en un seul coup qu’il avait besoin de temps pour le digérer. Quant au rouleau, c’était l’artefact spirituel qu’il avait obtenu. Étant donné qu’il s’agissait de calligraphie et qu’il pouvait émettre du Qi d’épée, il le nomma Calligraphie d’Épée en Cursive.
Ces deux objets attiraient l’attention de Ye Dachuan, Huang Binghu et Liu Hong, mais aucun ne fit de remarque ni ne posa de question déplacée. Peu importait la nature de ces objets, ils étaient les trophées de Li Qingshan, et personne n’avait le droit d’y toucher.
Li Qingshan demanda : « Chef chasseur, vos blessures vont-elles bien ? »
Huang Binghu répondit : « Ne t’inquiète pas. Je me suis blessé précisément pour que cela ne m’affecte pas. »
Li Qingshan resta un instant surpris avant de rire aux éclats. « Vous êtes vraiment un vétéran du jianghu. » Les gens sont complexes, influencés par leurs émotions et changeant selon leurs intérêts. Il y a du vrai dans le faux, du faux dans le vrai. Il est impossible de distinguer clairement entre le bien et le mal, les dettes de gratitude et les ressentiments, ni d’ailleurs d’en avoir le besoin. Une rencontre fortuite, un sourire pouvait dissoudre ces dettes de bonté et de rancune.
Huang Binghu rit de bon cœur avant de s’arrêter soudainement. « Mais le plus difficile reste à venir ! »
Xiao Hei s’avança et s’inclina profondément devant Li Qingshan, bien qu’ils aient le même âge. « Je vous ai déçu. » Tout ce qui s’était passé aujourd’hui l’avait profondément choqué. Si quelqu’un comme Li Qingshan devenait l’ennemi du village des tireurs, combien cela serait effrayant ?
Li Qingshan lui tapa sur l’épaule et se dirigea vers l’entrée de la forteresse. « Le soleil est presque levé ! »
Une lueur émergea de l’est, illuminant les nuages rouges. Le grand feu commençait à s’éteindre peu à peu.
Li Qingshan s’arrêta soudain. « Au fait, chef chasseur, est-ce vous qui m’avez donné le surnom de Tigre Descendu ? »
« Peut-être ? » Huang Binghu ne s’était jamais attendu à une telle question.
Li Qingshan demanda : « Pourriez-vous le changer ? »
Huang Binghu resta surpris avant de sourire amèrement. Ce surnom s’était déjà répandu parmi les gens du jianghu. Les circonstances étaient propices lorsqu’il l’avait inventé ; pourquoi aurait-il le droit de le changer maintenant ?
Li Qingshan ignorait encore qu’il aurait très bientôt un nouveau surnom.
Le Tigre Noir. Le Tigre Noir, Li Qingshan. (ndt : super l’ancien surnom était horrible)
Ye Dachuan ressentait une profonde frustration de n’avoir finalement pas trouvé le trésor de la forteresse du Vent Noir, mais il n’en laissa rien paraître. Son regard croisait celui de son conseiller de temps à autre, tous deux débordants de joie. C’est un grand mérite ! C’est un grand mérite !
Bien que Li Qingshan ait accompli tout cela seul, il était toujours le shérif recruté par Ye Dachuan, donc ce dernier recevrait également sa part de reconnaissance en tant que magistrat de district. Il imaginait déjà l’expression de son beau-frère, celui qui le méprisait, lorsqu’il apprendrait la nouvelle.
Ye Dachuan éclata de rire en donnant une grande tape sur l’épaule de Li Qingshan. « Hahahaha, plusieurs magistrats de district avant moi ont échoué à détruire la forteresse du Vent Noir, mais moi, je l’ai fait ! Bien sûr, tout cela est grâce à vous, shérif Li. Je ferai certainement rapport de cet exploit au préfet, qui est aussi mon beau-frère. Vous recevrez honneurs, promotions et richesses. Hahahaha ! »
Li Qingshan se rappela soudain qu’il détenait toujours un poste dans le gouvernement et sourit. « Dans ce cas, je dois remercier monsieur Ye. »
« Ce n’est rien, ce n’est rien du tout ! »
L’armée se remit en route pour retourner en ville. Sans rien de pressant à faire, Li Qingshan voyageait lentement avec les soldats. Peu à peu, tous s’aperçurent qu’il n’était pas aussi effrayant qu’ils l’avaient imaginé. Ils commencèrent à se rassembler autour de lui, le saluant de toutes sortes de surnoms tels que « shérif » ou « jeune héros ».
Li Qingshan appréciait énormément ce traitement héroïque, un accueil qu’il n’avait jamais connu auparavant. Comparée à la banalité de sa vie passée et à la frustration qu’il avait ressentie au village du Bœuf Accroupi, c’était cela, se dit-il, qu’il méritait en tant qu’homme. Contrairement aux idéaux de retenue ou de mépris des richesses, Li Qingshan ne s’encombrait pas de tels préjugés. Non seulement il aimait la renommée et la fortune, mais il appréciait aussi l’alcool, la viande, et la beauté des femmes. Il avait des désirs ; il avait de la fierté. Il savourait toutes ces choses qui attiraient les autres hommes.
Huang Binghu prit congé de Li Qingshan, retournant au village des tireurs pour récupérer l’alcool d’os de tigre que Li Qingshan lui avait demandé. Ce dernier ajouta, « Si tu as aussi du ginseng, amène-le. Je suis prêt à te l’acheter à bon prix. »
Cette affaire réglée, il pourrait enfin commencer à pratiquer le Poing du Démon Tigre de la Forge d’Os. Bien que le bœuf noir n’en ait jamais parlé, Li Qingshan pressentait que cette technique, d’apparence anodine, renfermait des secrets insoupçonnés.
Et même si cette technique n’était qu’ordinaire, elle n’avait aucun équivalent parmi les arts martiaux qu’il connaissait. C’était une capacité essentielle. Bien qu’il aimât la renommée et la fortune, il n’était pas aveuglé par elles. Il n’oubliait pas sa situation ; ce luxe temporaire n’était que le calme avant la tempête. De plus grands défis se profilaient à l’horizon. Sans préparation, il finirait brisé et vaincu.
Pourtant, loin de ressentir de la peur, il éprouvait même une excitation croissante. Il était prêt à défier la tempête, invitant la vie avec toutes ses épreuves. C’était là la voie qu’il avait choisie.
Bien qu’il soit plus facile de voyager de jour, ils transportaient un grand nombre de biens et ne pouvaient pas accélérer le rythme. Ce ne fut qu’au crépuscule que le groupe arriva devant les portes de la ville, où des tambours et des feux d’artifice les accueillaient.
Li Qingshan demanda : « C’est quel jour de fête aujourd’hui ? »
Liu Hong répondit : « Non, ils sont ici pour vous accueillir. Le magistrat de district avait envoyé des messagers pour annoncer la nouvelle. »
En entrant dans la ville, une vague de chaleur les enveloppa. Bien que ce soit l’hiver, les rues étaient bondées.
Tout ce qui s’était passé la veille avait ébranlé chaque habitant. Au matin, la nouvelle s’était propagée comme une traînée de poudre et l’agitation s’était emparée de la ville entière.
Li Qingshan sourit en recevant les éloges, mais il perçut également quelques regards hostiles venant de la maison de thé à côté de la rue. Ils sont venus si vite !
« Hmph, ce n’est qu’une grenouille dans un puits. Il a seulement détruit une forteresse de bandits. Frère aîné, quand l’attaquons-nous ? » Dans la maison de thé, une femme en bleu, au visage ordinaire mais à l’arrogance démesurée, demanda avec impatience.
« Pas encore. Attendons un peu. » Son frère aîné, un homme au visage de cheval d’une trentaine d’années, se tenait assis devant elle. Son allure simple cachait cependant des mains fines et agiles, une ceinture légèrement proéminente à la taille, et un regard perçant. Un observateur aguerri du jianghu aurait immédiatement deviné qu’il était un maître des armes dissimulées doté d’une grande force intérieure.
« Nous avons de la chance. Si la nouvelle se propage davantage, qui sait combien viendront tenter de voler ce trésor. Pourquoi ne pas frapper les premiers ? »
« Il a massacré deux cents bandits à lui seul. Personnellement, je ne pense même pas pouvoir en faire autant. La puissance de ce Tigre Descendu est à son apogée. Il est difficile à affronter. » L’homme au visage de cheval secoua la tête. Ils se trouvaient par hasard dans la ville de Qingyang et espéraient profiter de cette aubaine facile.
« Vous croyez vraiment à ces rumeurs absurdes ? Regardez ses pas lourds et sa démarche maladroite, ainsi que ses tempes plates. C’est juste un pratiquant d’arts martiaux externes. Au mieux, c’est un maître de second rang, mais sûrement pas de premier rang. Si nous allions ensemble à sa rencontre avec nos armes dissimulées, il ne ferait pas long feu. »
Mais tandis que l’arrogance se mêlait à leurs murmures, ils ignoraient que Li Qingshan les avait déjà remarqués. Le sourire sur son visage devint encore plus prononcé.